Bataille navale en Perse 3

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Troisième lettre du Navarque Iulius Emilius, en mission en Orient. Hiver 324

"Ave Consuls, ave Magistrats et Sénateurs,

Maintenant que le calme règne de nouveau sur la mer, maintenant que la fureur des combats s’est apaisée, maintenant que l’excitation des célébrations de la victoire est retombée, je peux prendre sereinement le temps de vous dresser un bilan des derniers événements et de l’action de Rome en Orient.

Aujourd’hui, nous sommes de retour dans le camp que les Grecs nous ont construit aux portes du Pirée, et nous attendons que l’hiver passe… Le camp des Romains est étrangement calme et à moitié dépeuplé… à chaque détour, à chaque action, chaque marin encore présent rencontre le spectre d’un compagnon disparu,… il se recueille et il se souvient…

A notre retour de campagne, nous avons été admirablement accueillis par la population d’Athènes. Je ne vous décrirai pas les scènes de joie et de liesse populaire que la victoire navale sur les Perses a fait éclater partout en Grèce.

Les Autorités Grecques, pour nous honorer, voulaient organiser un cortège triomphal aux marins romains, depuis le Pirée, jusqu’au cœur même d’Athènes, jusqu’au Parthénon… J’ai décliné cette offre… elle honorait avec trop d’ostentation l’action d’un seul marin, et s’était oublier un peu vite la part prise par Tarente et Naples… et j’ai demandé que tous les marins qui avaient combattu à cette mémorable bataille, reçoivent tous le privilège de participer à cette procession ! Chacun de nous, quelque soit son rang, quelque soit son pays natal, quelques soient les actions qu’il a mené, quelques soient les exploits qu’il a accompli, quelque soit la quantité de sang qu’il y a laissé, était là… et l’unique fait d’être là, valait bien à lui seul, tous les honneurs et toutes les louanges qu’on s’apprêtait à nous faire !

Les Grecs m’ont accordé ce plaisir, et c’est ainsi que tous, toutes nations confondues, nous avons longés les Longs Murs sous les vivats et les cris de joie de la foule, avons traversé la cité d’Athènes sous une pluie de fleurs et de morceaux de tissus multicolores et sommes monté jusqu’au sommet du Parthénon. Là, dans les temples grecs, aux pieds des statues grecques, nous avons sacrifié, prié et remercié nos dieux respectifs… Avec quelques officiers de mon Etat-Major, Citoyens romains, j’officiais aux côtés des Grecs, honorant pour nos hommes toutes les divinités du panthéon romain… Tout compte fait, Romains et Grecs, adorent les mêmes dieux… ils leur donnent simplement des noms différents… et eux, protègent simplement des Cités différentes…

Ensuite, chacun de nous fut happé par la ville, et chacun, selon sa condition, dû entrer dans chaque habitation… nous devions honorer de notre présence chaque maison, chaque habitant !… on nous gavait, on nous abreuvait… je ne compte plus le nombre de fronts de nouveaux-nés sur lesquels j’ai posé la main, le nombre de jeunes filles dont j’ai dû caresser la joue, le nombre d’épaules de jeunes garçons que j’ai serré, le nombre de saluts aux femmes et aux mères à en avoir mal aux reins, le nombre de coups de poing sur la poitrine pour saluer les hommes, à ne plus oser m’effleurer du bout des doigts… et chacun voulait me toucher… aujourd’hui encore, j’ai le haut des bras bleus d’avoir autant subi d’empoignades… et chacun voulait me parler… j’ai répété et j’ai répété, des fois et des fois, toujours les mêmes paroles… aujourd’hui encore, lors de mon sommeil, je marmonne : « notre devoir, gl oire aux dieux !… notre devoir, gloire aux dieux !… notre devoir, gloire aux dieux !…»

Quelques soient les sentiments que nous Romains, portions aux Grecs de l’Hégémon, que l’on ne s’y trompe pas ! Les Grecs, à quelques différences près, sont comme nous, vivent et prospèrent sous un régime politique fort semblable au nôtre. Même si pour l’instant, quelquefois sans doute, on leur fait subir quelques violences pour les tenir unifiés, chaque Cité de Grèce se gouverne toujours elle-même. Ce sont des Citoyens qui ont combattu à nos côtés. Tandis que la Perse est une nation de sujets, de sujets du Grand Roi, où chacun suit aveuglément la politique du monarque. Rien que ce fait justifie notre lutte et nos souffrances aux côtés de nos alliés… du moment ! Malgré tous les intérêts qui sont en jeu, c’est d’abord une lutte de conception du monde, une lutte de la liberté individuelle contre la servilité !

Il n’est pas juste non plus de croire que les Grecs sont décadents, et ne peuvent s’adapter aux évolutions du temps. Ils savent se battre et savent innover ! Certes, ils ont une longue tradition maritime, qui parfois les freine dans leurs ardeurs, mais ils possèdent une grande expérience de la mer, et savent employer toutes les astuces pour atteindre leur but…. S’il m’ont confié l’aile droite de la Flotte à Rhodes, ce n’est sans doute pas aveuglément… à rusé, rusé et demi !…

Et pour le Perse Commandant de la Flotte, il ne faut pas croire non plus, que c’est faute de connaissances qu’il s’est fait battre ! Il a peut-être, un peu, préjugé du rapport favorable des forces en présence, mais dès l’entame des manœuvres d’approche, il a été contraint d’agir comme il l’a fait… son seul tord est d’avoir suivi les signaux que je lui adressais… mais pouvait-il imaginer qu’il avait en face de lui un Romain qui, jusqu’au bout de l’anéantissement, défendrait… rien ?…

Il l’a payé très cher ! Il engageait plus de 400 navires de guerre… nous en avons capturé une centaine intacts, et amené une cinquantaine, légèrement endommagés, dans les arsenaux pour y être remis en état… Le reste à été détruit !

Près de 50 000 marins servaient sur ces navires. Aujourd’hui, 40 000 d’entre eux sont prisonniers des Grecs… en une seule journée, 10 000 ont perdu la vie !

Tout compte fait, il y a peu de noyés lors d’affrontements de ce type. Une galère éperonnée, éventrée, est hors combat, ne sert plus à rien, mais généralement ne coule pas… parce qu’elle est construite en bois… et que le bois flotte ! Après la bataille, il suffit de récupérer les rameurs qui attendent sur l’épave, inutiles, que le combat se termine.

Cependant, au moment du choc, lorsque l’éperon adverse laboure le flanc du navire, le bois éclate, et les échardes sont projetées sur les bancs de rames avec violence. Celui qui se trouve sur leur trajectoire a bien peu de chance de s’en sortir. Elles peuvent frapper n’importe quel endroit du navire, personne n’est à l’abri, et leurs blessures sont souvent mortelles. De plus, si le rameur ne retire pas assez vite sa propre rame de la trajectoire de l’agresseur, il risque fort d’être enlevé comme un fétu de paille, projeté et écrasé par la force que l’étrave ennemie transmet au bout de bois qu’il tient solidement dans ses bras…

Sur un navire de guerre, ont meurt par le bois…

Les pertes grecques de l’aile gauche sont quasi inexistantes… Ils sont arrivés en position dominante et n’ont eu à attaquer, pas à se défendre.

Pour notre aile, l’aile droite, quasi tout a été détruit,… sur les 100 galères engagées, tout au plus en avons nous ramené un vingtaine, plus légèrement blessés et réparables. Sur près de 20 000 hommes embarqués le matin, moins de 10 000 ont vu le soleil se coucher le soir… et les forces de Rome représentent la juste moitié de ces effectifs…

Les 50 transports romains sont tous détruits, et sur les 500 Scythes embarqués à bord, seuls quelques uns seulement sont blessés.

Des feux ont étés allumés sur les plages de Rhodes, et ils ont brûlé trois jours… Le bois des épaves les alimentait… et par nation, quand leur état permettait de l’identifier, les dépouilles des marins morts si loin de leur terre natale, y étaient jetés. Des prisonniers perses se chargeaient de la besogne, des officiers grecs, romains et perses présidaient aux cérémonies et confiaient les âmes de leurs hommes à leurs dieux respectifs.

Pères Conscrits ! Honorez la mémoire de ceux qui ont combattu pour Rome, si loin d’elle !

Dans le camp du Pirée, en cet hiver 324,


Emilius Iulius, Navarque 306-324"


Bataille maritime Perse