Cornelius Scipio Publius Sr

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Un des rejetons de la célèbre famille Scipio appartenant à l'illustre gens Cornelia qui a servi avec dévouement, noblesse et gloire Rome avant même la fondation de la république, guidant avec ses pères la cité de Rome lors de ses premiers pas et dans les moments décisifs de la chute de la monarchie, Publius CORNELIUS SCIPIO, né en 265, est le fils de Publius senior, lui-même né en 214.

Publius senior, le père (214-293) :

Après une éclipse de la famille, Publius senior s’était décidé à reprendre le flambeau d'une famille qui avait connu une relative éclipse.

En effet, un de ses grands-oncles, alors consul, avait été responsable d'une lourde défaite militaire en prenant une décision irréfléchie. Cela lui avait valu le surnom d'"âne" et des sarcasmes très mal vécus par sa famille. Plusieurs membres de la gens Cornelia sombrèrent dans l'alcoolisme et la débauche ou dans la mélancolie et l'oisiveté. Cnaeus, un cousin du jeune Publius CORNELIUS SCIPIO senior, très épris d'hellénisme comme l'ensemble de la famille, avait une passion particulière pour certains enseignements et pratiques de Socrate. Comme son maître à penser, il s'administrait des plaisirs solitaires sur le forum, ce qui lui a valu les foudres des censeurs.

Publius CORNELIUS SCIPIO senior s'est efforcé, comme son grand-père Lucius et son propre père Publius avant lui, de faire honneur à la cité et au nom de ses ancêtres. Avec succès.

Après la mort prématurée de son père, tombé au champ d'honneur contre les étrusques, PCS senior a décidé de reprendre le flambeau familial. Entré au Sénat en 248 après avoir accompli ses devoirs militaires, il s’est consacré corps et âme à la vie politique.

Ambitieux comme tout aristocrate romain qui se respecte, mais courtois et affable, il souhaitait concilier la majesté du Sénat et les légitimes attentes populaires. Il estimait que la noblesse ne devait pas être synonyme de morgue mais ne tolérait pas que la volonté de satisfaire les besoins de la plèbe dégénère en une démagogie susceptible de bouleverser l'ordre social et politique. Il faisait aussi partie de ces tout premiers patriciens romains ne limitant pas leur horizon à l'Italie. Ayant lui-même reçu une éducation à la fois romaine et grecque, il a veillé à ce que son fils Publius le jeune soit élevé de la même façon.

A la fois réaliste et partisan d'une politique ambitieuse que certains esprits timorés qualifieraient d'impérialiste, PCS senior souhaitait que Rome s'impose, si possible par l'amitié et l'admiration que suscite son rayonnement et son exemplarité, si nécessaire par la force de ses armes. Maniant par principe un langage châtié, il lui arrivait, certains diront par orgueil, lui répondra par lucide connaissance de sa valeur, de perdre patience et de recourir aux sarcasmes envers ses contradicteurs. Marcus Lucius ACTAE avec qui il s’est irrémédiablement brouillé avec l’affaire du triumvirat et Septimus CRASSUS en ont fait l’expérience.

Membre de la commission de réflexion sur les institutions, Publius a participé activement à cet intense travail de codification et de réforme. Il y a fait la connaissance étroite de vétérans du Sénat et y a noué de sincères amitiés : Quintus ECRITUS STILO, Kaeso THIMESTIUS et Titus CLAUDIUS qui était son beau-frère via les soeurs MARXIMUS.

Questeur en 250. Edile en 251 lors de l’année terrible qui a vu la tentative d’instaurer un triumvirat illégal au moment où Rome subissait l’assaut des troupes napolitaines, il s’oppose de toutes ses forces au coup d’Etat. Son caractère et ses opinions apparaissent ici clairement : souple sur les moyens et ferme sur les objectifs, soucieux de la paix civile mais intransigeant sur le respect de la république. Episode terrible que ce coup d’Etat mené par un consul avec qui il collaborait étroitement et son beau-frère qu’il a tenté en vain jusqu’au bout de persuader de revenir dans le droit chemin. A quelque chose malheur est bon : il noue de nouvelles amitiés dans cette tourmente. Préteur en 252, il prend rapidement la relève de Titus ANDRONICUS pour conduire nos troupes contre Naples même et obtenir une paix victorieuse pour Rome. Il a été prorogé dans sa mission en 253 en étant nommé propréteur par le Sénat et parachevé la conclusion d’une paix toute provisoire permettant à Rome de se refaire une santé après 6 ans de guerre ininterrompues. Par la suite, consul à 7 reprises et 2 fois censeur, PCS senior est parvenu au faîte des honneurs.

Il a néanmoins été frappé par le malheur. La terrible année 255 voit le décès de sa femme Gorbatcheva MARXIMUS, âgée de 45 ans, puis de ses 2 jumeaux, son 1er fils, Publius et sa fille Pomponia emportés par une maladie infantile. Des rumeurs ont alors couru sur une vengeance voire une malédiction. Ce qu’on sait, c’est que PCS senior a alors fait des dons considérables, à Neptune notamment. Il décide ensuite de prendre du champ et voyage comme privé et comme ambassadeur : à Carthage, en Grèce balkanique où il noue des relations dans les cités et royaumes grecs.

A son retour à Rome, la politique, cette maîtresse insatiable le reprend passionnément. On le retrouve aux premières loges sur tous les fronts : Campanie, Samnium, côte adriatique ou Italie du nord. On le dit alors habité par Mars et par Vénus après qu’il l’a été par Mercure. En effet, quand il n’est pas sur un théâtre d’opérations, il collectionne les conquêtes féminines. Jusqu’au jour où il songe à s’assurer une descendance masculine. Séduit par sa fraîcheur, sa jeunesse et son esprit, il épouse fin 264 Cornelia ECRITUS STILO, la fille aînée de son ami Quintus ECRITUS STILO. Elle le comble en lui donnant un solide rejeton, Publius junior dès 265. Le bonheur conjugal s’avère malheureusement fugace puisque Cornelia meurt en couches dès 267.

Tout en veillant attentivement sur l’éducation de ce fils si désiré, PCS senior replonge alors complètement dans la politique et les manifestations édilitaires et culturelles. Influencé par la culture grecque il patronne l’adaptation du théâtre grec à la mode romaine et accueille dans sa domus quantité de philosophes, rhéteurs, savants et hommes politiques grecs.

En 274, PCS senior, toujours vert épouse en troisièmes noces une jeune beauté, Lucia QUINCTIUS FLAMININUS, fille d’un de ses proches. Elle lui donne une fille Paulla en 275 (mariée en 291 à Manius ECRITUS STILO, fils de son ami Quintus et par le jeu des mariages successifs oncle de son fils Publius), un fils Lucius en 277 et une fille Quinta en 281 (mariée en 307 à son cousin Marcus CAECILIUS METELLUS).

Il voyage beaucoup avec son fils Publius junior qu’il emmène à Athènes, à Sparte, à Corinthe, à Delphes, Olympie et Némée ainsi que dans les royaumes macédonien et épirote. Il l’emmène aussi à Carthage, conforté dans son pressentiment que les relations avec cet Etat seront l’enjeu décisif pour les générations à venir. Il veille lui-même à son éducation militaire. Sur la fin de sa vie, PCS senior prend du champ. Pendant qu’un neveu de la famille Scipio est au Sénat, lui va accomplir de lointains voyages en Gaule et en Hispanie d’abord puis en Orient où il se rend en Egypte et en Syrie et même en Perse. Qu’a-t-il fait là bas ? Nul ne le sait précisément. On raconte qu’il serait allé jusqu’au lointain pays d’où est originaire le dieu Bacchus, où les hommes ont la peau noire et où certains prôneraient la quête de l’éveil. Il ne revient à Rome qu’en 292 sans qu’on soit certain qu’il en soit revenu détaché de toute tentation charnelle. On raconte en effet que pendant des semaines après son retour à Rome, toute sa domus a été réveillée à une heure avancée de la nuit par les « chants » de son épouse. C’est d’ailleurs dans les bras de celle-ci qu’il décède un an plus tard.

Publius le jeune, le fils (265-323)

Dès 282, PCS junior fait son service militaire. Portrait craché de son père, il se lance comme lui avec l’énergie de la jeunesse dans la politique. Tribun militaire pour commencer, il est questeur en 296 et 297, édile en 299, préteur en 302 et 303 et consul en 306 et 307.

Il a épousé en 295 Valeria CLAUDIUS PULCHER, une jeune patricienne au sang aussi bleu que les Scipio, née en 278, qui lui a déjà donné 5 enfants dont 1 fils, Publius le jeune, et 4 filles, l’aînée, Claudia, étant devenue vestale du dieu Mercure.

Il nourrit de grandes ambitions pour Rome sur le plan international. Il est modéré mais ouvert sur le plan intérieur, attaché à la fois à la permanence ainsi qu’à l’ouverture et l’adaptation des institutions car il sait que l’accroissement de la domination romaine est un véritable défi pour les institutions d’une cité, tant sur le plan de sa capacité à gouverner un vaste domaine forcément hétérogène que sur celui de la place du peuple dans la vie politique.

Le consulat de 306 avec comme collègue son parent et ami Manius Ecritus Stilo restera dans sa mémoire comme le modèle de l’exercice collégial et efficace de cette magistrature. En revanche, celui de l’année 307, où il exerce de fait quasi seul le consulat en subissant le harcèlement de quelques vieilles familles patriciennes lui laisse un goût amer compte tenu, de surcroît, de la difficulté éprouvée par ailleurs à faire avancer de façon satisfaisante la diplomatie romaine auprès d’Etats clés.

Si jamais il l’avait oublié, il aura eu un rappel du caractère souvent héréditaire des inimitiés à Rome. Comme leurs pères, les fils Cornelius Scipio et Actae se sont heurtés frontalement. Ces conflits auront aussi été l’occasion de mettre en exergue un des traits de sa personnalité. Publius est politique et supporte mal que des querelles personnelles viennent polluer l’action politique de la cité.

Débatteur né, juriste ayant présidé à de nombreux débats législatifs au cours de ses multiples consulats et se montrant particulièrement exigeant sur la notion comme sur la qualité de la loi, que veut être PCS ?

Une figure tutélaire de la république ? Qu’il ait pu apparaître comme tel en raison de son activisme et de sa position est compréhensible. Ce serait cependant commettre une erreur que de le croire. Publius est tout simplement un aristocrate romain jusqu’au bout des ongles. La première place ? Il l’a eue et sait la vanité des honneurs et du pouvoir. Il aspire tout simplement mais inlassablement à servir la république dans un cadre collégial, avec les meilleurs, et ne s’est jamais aussi épanoui qu’entouré de pairs, sachant bien que le sort de la cité devait reposer entre plusieurs mains d’hommes compétents.

Est-ce en raison de ces conflits et de ces chicaneries, une certaine lassitude aidant, qu’il décide de prendre du champ en ne se représentant pas au consulat pour 308 et en se dévouant pour que les 2 postes de préteur soient pourvus ? Difficile à dire tant les motivations pouvaient être variées. Incontestablement, l’amitié et le soutien de son parent Manius Ecritus Stilo et d’autres sénateurs, ainsi que l’attrait irrésistible de la politique lui ont permis de ne pas hésiter longtemps. C’est avec une grande satisfaction qu’il voit le Sénat se renouveler avec l’arrivée de nouvelles figures, Marcus Tullius Cicero, Livius Cornelius Nero, un lointain cousin, et Scipio Valerius, avec lesquels il noue des liens étroits.

Dès 308, en raison de la grave maladie incapacitant le consul Britannicus, il prend en charge la conduite des négociations avec l’archonte Ophépias de Tarente. Au même moment, éclate la mystérieuse, incompréhensible diront certains, affaire Talarius-Bustos par laquelle le 1er aurait cherché, avec l’appui du second, à déclencher une guerre entre les grecs et Carthage, dans laquelle Rome appuierait les grecs comme un bon petit bénévole combattant naïvement pour leur bénéfice en vue d’arracher aux puniques la Sicile qu’ils dominent depuis 250. Outre l’atteinte évidente aux institutions de la république, Publius CORNELIUS SCIPIO est choqué par l’absurdité d’un tel projet : faire la guerre contre la très puissante et lointaine Carthage alors que Rome ne domine pas ou ne s’est pas encore assuré de la bienveillance de la totalité de l’Italie.

De nouveau consul sans discontinuer en 309 et 310, il redouble donc d’énergie pour conduire la négociation avec Tarente de façon à conjurer une telle évolution, contraire aux intérêts fondamentaux de Rome et au bon sens. Celle-ci aboutit à la conclusion d’un traité en 309 qui garde ouvertes toutes les possibilités pour Rome tout en liant Tarente sur l’essentiel.

Hélas, le ver est dans le fruit puisque Tarente, alliée au royaume d’Epire, a fait débarquer une armée épirote sur son sol et semble alliée avec Rhegium. Est-ce pour attaquer Carthage en Sicile ? Des événements le laissent croire quelque temps. Mais très vite, alors que Rome demande le respect du traité dont les clauses essentielles sont gravement violées par Tarente, la situation change radicalement. Un nouvel archonte, Vandettas prend le pouvoir à Tarente, totalement appuyé par les épirotes qui se comportent en maitres du pays, et dénonce le traité. C’est la guerre entre Rome d’une part et Tarente et l’Epire d’autre part, suite à une série inqualifiable de violations et sacrilèges commis par les grecs.

PCS prend la tête de l’armée chargée de porter la guerre contre l’ennemi. Après une pénétration en territoire tarentais et de longues et complexes manœuvres entrecoupées d’escarmouches en vue de trouver un terrain adéquat, une première grande bataille a lieu. Si les romains en sortent incontestablement vainqueurs, infligeant de sévères pertes à l’ennemi, les aléas climatiques ont permis aux grecs de se retirer en bon ordre et d’ôter tout caractère décisif à cette bataille.

Après avoir fait sans succès une nouvelle proposition de paix, proposant à Tarente la paix en échange de la soumission, PCS, réélu consul in absentia pour l’année 311, réengage le combat décisif face à l’armée ennemie …

Et il remporte, à proximité de Métapontum, une victoire écrasante sur l’armée tarento-épirote. Adoptant un dispositif oblique, il commence par mettre la pression sur l’aile gauche ennemie, faisant pilonner leurs troupes légères par nos archers et débandant les unités légères avec une charge de cavalerie sans que la cavalerie ennemie ait pu contre-attaquer face à la rapidité et à la maîtrise déployées par nos troupes dans l’exécution de la manoeuvre. Puis est venu le choc des cavaleries. Là encore, les romains et leurs alliés ont fait merveille, anéantissant littéralement la cavalerie ennemie.

Une fois les tarento-épirotes privés de leurs unités les plus mobiles, il lance une manœuvre d’enveloppement par les ailes qui a pour effet de séparer la phalange grecque du gros des troupes légères grecques. Prise de flanc et de face entre nos cohortes, par nature plus mobiles, alors que notre cavalerie charge sur ses arrières, la phalange tarento-épirote est irrémédiablement cernée. Dès lors, la victoire était acquise pour Rome. Un véritable carnage a été fait des hoplites ennemis. Puis, notre armée parachève la victoire, chargeant les unités légères ennemies désormais incapables de s’opposer efficacement aux légions. Ceux qui n’ont pas pu fuir ont été faits prisonniers quand ils n’ont pas été tués.

En deux batailles, Rome a tué 10000 ennemis et en a fait prisonniers 15000 alors qu’elle déplorait de son côté 1000 morts. Le moral ennemi semble irrémédiablement atteint. L’armée romaine met immédiatement le siège devant les murailles de Tarente et Publius lance un ultimatum à la ville : la reddition ou la destruction. Après une courte hésitation due aux remous internes et à la panique, la partie de la classe dirigeante de Tarente qui avait porté Vandettas au pouvoir et soutenu sa politique criminelle s’enfuit d’Italie avec les débris de l’armée épirote. Tarente s’en remet à la fides de Rome et l’armée romaine prend le contrôle de la ville. Victoire stratégique décisive qui donne à Rome le contrôle de l’Apulie, complétant pratiquement l’empire des romains sur l’Italie.